Couleur, forme, odeur : parlons des selles des enfants
Nous abordons souvent et volontiers le thème du contenu des couches de nos enfants et de ce qu'ils font aux toilettes. Une experte nous explique pourquoi prêter plus d'attention à son aspect et à son odeur en vaut la peine. Et pourquoi nous devrions aussi parler des excréments des adultes.
La naissance d'un enfant modifie le rapport qu'on a avec les matières fécales. Elles deviennent en effet un sujet permanent. Est-ce que le bébé a déjà fait caca aujourd'hui ? Si oui, est-ce qu'il y en avait beaucoup dans la couche ? De quelle couleur était-il ? Quelle forme avait-il ? Quelle en était la consistance ? Et l'odeur ? Soudain, à l'apéro, vous vous surprenez à parler des excréments de votre progéniture avec des amis parents, et vous trouvez cela tout à fait normal. Vous n'auriez en revanche jamais osé raconter vos anecdotes intimes aux toilettes dans le même groupe. Et encore moins devant votre conjoint. C'est bien connu, même après des années de vie commune, beaucoup sont gênés de faire la grosse commission devant leur partenaire.
Ainsi, alors que le caca des enfants semble être la chose la plus normale du monde, celui des adultes mène une existence triste et reste dans l'ombre. C'est assez paradoxal.
Plus aqueux et jaune que jamais
Je réfléchis à tout cela alors que je change les draps sales de mes enfants pour la quatrième nuit consécutive. Et, en même temps, je discute en détail avec mon mari des sécrétions supérieures et inférieures de nos filles, qui ont une gastro, et plus particulièrement de la diarrhée de notre fille de deux ans et demi. Cette dernière est liquide et jaune, comme nous ne l'avions jamais vue auparavant. Et en six ans de parentalité, autant vous dire que nous avons déjà vu passer quelques couleurs et consistances de selles. Une fois de plus, je cherche sur Google des informations sur les excréments humains, compare les schémas de couleurs avec le contenu de nos toilettes. Et je me sens stupide. Je me demande si d'autres mères et pères font pareil.
« Nous le reniflons de toute façon »
C'est le cas, comme me l'a assuré Lucia Cremer quelques jours plus tard lors d'une interview téléphonique. L'infirmière pédiatrique allemande est l'auteure de guides pour bébés et gère le portail d'informations Babytipps24.de (en allemand). « Mes articles sur les selles des enfants enregistrent beaucoup plus de clics que les autres », dit-elle. Et ce n'est ni de la surprotection ni de la panique : « Un changement dans les selles devrait toujours être pris au sérieux par les parents, même s'il est souvent inoffensif, surtout chez les bébés. »
Je profite de ses conseils d'experte pour savoir quelles selles pourraient effectivement être préoccupantes. Lucia Cremer partage deux règles d'or. La première : il faut tirer la sonnette d'alarme dès que l'odeur change : « si les selles paraissent soudainement plus acides, cela peut être le signe avant-coureur d'une infection », dit-elle. « Heureusement, nous reniflons toujours inconsciemment. C'est notre système d'alerte intuitif. » Deuxième règle : les parents devraient consulter un pédiatre si, au-delà de l'odeur, ils pressentent quelque chose d'anormal. La loi tacite selon laquelle les néo-parents doivent se fier à leur instinct s'applique donc aussi aux matières fécales.
La grande palette de couleurs de selles
Ensemble, nous parcourons la palette de couleurs des selles. Et je constate qu'elle est plus grande que je ne le pensais. En principe, la couleur a quelque chose à voir avec l'âge de l'enfant et avec la nourriture, précise Lucia Cremer. « Il ne faut jamais négliger cet aspect. »
Vert foncé-noir chez les nouveau-nés
Ce qu'on appelle le méconium est la première selle, presque inodore, peu après la naissance. Le contenu de l'intestin du bébé contient encore ce qu'il a avalé dans le ventre de sa mère.
Vert clair à jaune-crème
Qu'il s'agisse d'un bébé allaité ou nourri au biberon, les selles deviennent plus claires au cours des premières semaines de vie. « La mousse est typique d'un enfant allaité qui ne tète pas bien », explique la spécialiste. Si c'est le cas de votre enfant, vous devriez consulter un conseiller en allaitement. Les bébés nourris au biberon vont à la selle une fois par jour, sait Lucia Cremer, qui forme également des spécialistes des nourrissons nourris au biberon (en allemand). « En revanche, il est normal que les bébés allaités n'aient pas de selles pendant quelques jours. »
Vert
Entre son quatrième et son sixième mois de vie, bébé commence à manger des bouillies. À partir de ce moment-là, vous retrouverez les couleurs des aliments dans le contenu de sa couche. Les épinards, par exemple, sont responsables de selles verdâtres. Tout comme les préparations à base de fer. « Mais en même temps, le vert peut aussi être un signal d'alarme pour une infection gastro-intestinale ou un rhume. » L'odeur légèrement acide est ici déterminante.
Jaune
Ici aussi : en plus de l'odeur acide, une infection du tractus gastro-intestinal ou une autre maladie pourrait être présente. Ainsi, si des symptômes tels que des douleurs abdominales ou des diarrhées s'ajoutent aux selles jaunes, un conseil pédiatrique s'impose. Parfois, les œufs ou les produits laitiers peuvent également provoquer une couleur jaune.
Rouge
Si les selles sont rouges, vous allez certainement d'abord prendre peur. Mais il pourrait aussi simplement s'agir de betteraves rouges. « Le sang serait sur le dessus », explique Lucia Cremer. Si tel est le cas, les parents devraient immédiatement consulter un pédiatre. « Même pour une infime goutte de sang dans l'urine. »
Noir
Les préparations à base de fer pourraient en être la cause. Très rarement, il peut également s'agir d'une hémorragie intestinale. Hormis le méconium, si les selles sont noires, il faut toujours consulter un spécialiste, dit Lucia Cremer.
Couleur argile voire blanchâtre
L'experte conseille également de consulter un médecin en cas de selles très claires. Les raisons possibles ici sont multiples : un manque de bile serait une cause possible. Mais parfois, ce sont simplement les médicaments contre la diarrhée qui en sont responsables ou de l'eau riche en calcaire pour un bébé nourri au biberon.
« Pas de chose poisseuse à l'odeur désagréable »
Pendant trois quarts d'heure, je discute avec cette experte en pédiatrie et blogueuse sur les portails pour bébés de toutes les textures et couleurs d'excréments chez les enfants, sans même ressentir une once de dégoût. Nous pourrions tout aussi bien parler de la dernière tendance en matière de jouets ou de petits vêtements pour bébés. En revanche, si nous devions disséquer les excréments d'adultes de manière aussi détaillée, je crois que je lutterais alternativement contre la gêne et l'envie de vomir.
« Chez les adultes, la défécation est effectivement un grand sujet tabou », me confirme Lucia Cremer. Et à tort, selon elle. « Les selles ne devraient pas être simplement rejetées comme une chose poisseuse à l'odeur désagréable. » Elle souhaite une approche plus décontractée et recommande donc régulièrement à ses étudiants de lire le best-seller Darm mit Charme (Le charme discret de l'intestin en français), afin de lever les inhibitions.
« La digestion pèse des milliards, nous voyons tous les jours tant de publicités avec des remèdes pour l'intestin. Mais nous ne pouvons toujours pas en parler ouvertement », fait remarquer Lucia Cremer, qui ajoute : dans le domaine des soins gériatriques, le thème est alors à nouveau omniprésent, comme pour les enfants.
Des toilettes bruyantes au petit coin
C'est effectivement absurde. D'autant plus que les selles n'ont manifestement pas toujours été un sujet tabou. Les Romains de l'Antiquité, par exemple, s'accroupissaient alors dans ce qu'ils appelaient des latrines pour faire leurs besoins côte à côte, sans petites cloisons. Au Moyen-Âge, les gens se soulageaient sans vergogne sur la voie publique ou fertilisaient directement les champs avec leurs excréments. Et aujourd'hui, nous nous enfermons dans une cabine que nous appelons « petit coin »... Mais passons. Mon collègue a déjà raconté l'histoire des toilettes en détail (article en allemand).
D'ailleurs, après le cinquième lavage nocturne des draps, une visite chez le pédiatre, beaucoup de biscottes et de bretzels salés, et au moins autant de nerfs usés, mes filles vont mieux. Rendez-vous au prochain virus... Mais alors avec le schéma de couleurs en tête et au-dessus de la cuvette des WC.
Maman d'Anna et d'Elsa, experte en apéritifs, passionnée de fitness en groupe, aspirante ballerine et amatrice de potins. Souvent multitâche de haut niveau et désireuse de tout avoir, parfois chef en chocolat et héroïne de canapé.