

Le Huawei P60 Pro à l’essai : une tragédie en cinq actes

L’arrière nacré du P60 Pro de Huawei saute tout de suite aux yeux. Doté d’un stabilisateur d’image optique et d’un zoom, il n’est pas juste là pour faire joli. Mais le téléphone est beaucoup trop limité et nécessite trop de bricolage.
Huawei est pieds et poings liés depuis près de quatre ans en ce qui concerne l’utilisation des services Google et du réseau 5G en Europe. Le fabricant chinois ne baisse toutefois pas les bras et lance le P60 Pro par chez nous. L’appareil photo avec diaphragme physique est super, mais j’ai du mal à renoncer à mes applications préférées. Les alternatives existent mais sont limitées. Place à une tragédie en cinq actes.
Acte 1, exposition : un design unique
Je teste le Huawei P60 Pro dans le coloris « Rococo Pearl ». La structure en poudre de perles minérales au dos rend chaque modèle unique. J’aime les différents motifs qui se dessinent en fonction de la luminosité. L’effet mat est également agréable au toucher. Il existe aussi en noir classique avec une surface cristalline anti-traces de doigts.

Source : Michelle Brändle
Dès le début, le téléphone me semble familier. Pas étonnant, mon Oppo Find X5 lui ressemble au niveau du design, du gabarit et du toucher. Ça commence bien !

Source : Michelle Brändle

Source : Michelle Brändle
Acte 2, l’élément perturbateur : Snapdragon sans 5G
Les premières limites apparaissent : le processeur phare Snapdragon 8+ Gen 1 de Qualcomm n’est présent que dans sa variante 4G. Huawei n’est en effet pas autorisé à utiliser la variante 5G pour l’Europe.
Je teste habituellement le processeur avec Geekbench 6. Mais la dernière version de l’application de test de performance n’est pas disponible dans l’Appstore Huawei… j’y reviendrai plus tard. Geekbench 5 suffit toutefois à donner une indication sur les performances de l’appareil.
Le P60 Pro marque 1300 points dans le test monocœur et 4105 points dans le test multicœur. En comparaison, les smartphones dotés du même processeur s’en sortent un peu moins bien. Le tableau ci-dessous le compare au OnePlus 10 Pro et au Sony Xperia 1 IV.
Le P60 Pro est équipé d’une batterie de 4815 mAh qui se recharge en 45 minutes avec l’adaptateur secteur de 66 watts fourni. En utilisation, il tient donc 20 heures, c’est très bien ! La plupart des smartphones vedettes parviennent à peine à finir la journée. Vous pouvez également le recharger sans fil jusqu’à 50 watts.
Le P60 Pro pèse 200 g et loge aisément dans ma petite main puisqu’il ne mesure que 8,3 mm d’épaisseur. Il est étanche à l’eau et à la poussière conformément à la norme IP68. D’après Huawei, vous pouvez donc immerger le téléphone pendant 30 minutes dans maximum deux mètres d’eau sans dommages permanents. L’écran est protégé par du verre Kunlun incassable. Celui-ci a obtenu la première certification cinq étoiles en résistance aux chutes de la part de la SGS (Société Générale de Surveillance).

Source : Michelle Brändle
L’écran OLED du P60 Pro mesure 6,67 pouces et renvoie une image nette au rendu des couleurs intense : le noir apparaît vraiment noir. Vous pouvez réduire la résolution maximale de 2700×1220 pixels jusqu’à 1890×854. La densité de pixels est donc de 444 ou 310 pixels par pouce. Le taux de rafraîchissement peut atteindre 120 hertz et s’adapte à votre utilisation. Vous pouvez la régler manuellement sur 60 hertz.

Source : Michelle Brändle
Le smartphone possède un mode Always on Display de la météo 3D. Vous pourrez contourner cette application énergivore avec un autre réglage : cliquez sur l’écran éteint pour afficher brièvement la météo et l’heure. Cela consomme moins d’énergie et la fonction reste la même. Vous pouvez personnaliser le mode Always on Display de plusieurs façons, mais il vous faudra d’abord télécharger l’écran de verrouillage météo.

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Acte 3, l’apogée : un zoom convaincant
Le gros point fort du Huawei P60 Pro est son appareil photo. L’appareil principal de 48 mégapixels avec diaphragme physiquement réglable (f/1.4-F/4.0) est la vedette du module. Le téléobjectif (f/2.1) affiche quant à lui 48 mégapixels avec un zoom optique 3,5×, et l’ultra grand angle (f/2.2) 13 mégapixels. Il en va de même pour l’appareil photo frontal.

Source : Michelle Brändle
Les longueurs focales sont de 13, 24,5 et 90 millimètres. Grâce au pixel binning qui améliore la sensibilité à la lumière, une photo de l’appareil principal a par défaut douze mégapixels. Il faut activer un mode spécifique pour obtenir les 48 mégapixels.
Dans les tests, c’est surtout l’appareil photo principal qui prend de belles photos. Ce qui me dérange sur cet appareil et beaucoup d’autres appareils de smartphones, c’est la réduction excessive du bruit. Les photos ont l’air fausses et troubles, elles sont belles sur le téléphone mais trop détaillées sur l’ordinateur.

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L’appareil photo reste très performant au crépuscule, le mode nuit est superflu puisqu’il n’éclaircit rien.

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Le diaphragme physique fait un super boulot. Les objets et les personnes sont joliment mis en scène. En comparaison, le diaphragme numérique accentue le bokeh, parfois un peu trop.

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L’objectif grand angle est plus faible que l’appareil photo principal, ce qui se remarque surtout sur l’ordinateur. Le sujet est ici fortement déformé, l’application de l’appareil photo ne propose pas de correction de la distorsion. En dehors de ça, la qualité de l’image est équivalente à celle de l’appareil photo principal.

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Le zoom m’a convaincue, le grossissement 3,5× est très efficace. Je peux m’en servir pour me rapprocher de vaches dans une prairie lointaine. Niveau qualité, je constate une forte dégradation avec le zoom 10× qui aplatit le relief. L’autre zoom numérique jusqu’à 100× est inutilisable sur le plan qualitatif, en plus d’être difficile à utiliser dans la pratique. Le zoom agrandit tellement que je ne trouve plus mon sujet et que j’ai du mal à le replacer devant l’objectif.

Source : Michelle Brändle

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La caméra frontale fournit des photos de bonne qualité. Mais le bokeh numérique coupe mes cheveux de manière peu naturelle en mode selfie. Le résultat de la version classique est plus joli, même si la netteté est exagérée et le vert trop marqué.

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Un autre point fort est le mode macro et super macro qui permet de très gros plans. Le petit gluant de Dragon Quest sur mon clavier est terriblement effrayant avec le super macro.

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Côté vidéo, vous disposez de différents réglages, de 720p à 30 fps jusqu’à 4K et 60 fps. Je vous recommande ce dernier qui produit de plus belles vidéos. Elles sont troubles sur ordinateur, mais posées et fluides sur le smartphone. L’accentuation excessive des détails se remarque également sur les images en mouvement.
Acte 4, les péripéties : Huawei remplace Google par EMUI
Les applications et les logiciels sont un élément captivant du P60 Pro. Confronté au boycott américain, Huawei a dû miser sur son propre Appstore et sur le système d’exploitation EMUI 13, basé sur la version open source d’Android.

Source : Michelle Brändle
Hélas, je ne trouve que la moitié des applications que j’utilise le plus souvent, et encore. Un bref aperçu de ce que j’utilise souvent et de ce que j’ai trouvé :
Dans l’Appstore de Huawei :
- Telegram
- Coop
- Just Eat Switzerland
- Netflix
- Spotify
- UBS-E-Banking
- Instagram (en tant que fournisseur tiers uniquement)
Indisponibles dans l’Appstore de Huawei :
- Migros
- plusieurs applications bancaires (banques cantonales et Raiffeisen Suisse)
- CFF
- YouTube
Bref, ce n’est pas avec ça que je vais m’en sortir au quotidien. L’installation manuelle des services Google et du Play Store est faisable mais compliquée parce que Huawei ne dispose d’aucune autorisation de Google.
Passons aux applications de Huawei. Le navigateur web ne fonctionne pas toujours de manière fiable. Les recherches web pures renvoient des messages d’erreur, les recherches mixtes fonctionnent de manière moyennement satisfaisante. Si je cherche une recette de gâteau, je dois être bien précise pour ne pas obtenir de résultats bizarres. Heureusement, Huawei propose aussi Microsoft Bing qui fonctionne un peu mieux.

Source : Michelle Brändle
Le Store est aussi limité en ce qui concerne les livres et les films. Des auteurs populaires comme Sebastian Fitzek ou Juli Zeh n’y figurent pas, je ne trouve que quelques émissions en direct et des séries pour enfants. On peut accéder à YouTube via le navigateur web. En revanche, les livres disponibles se lisent facilement sur l’écran.

Source : Michelle Brändle
Au moins, Petal Maps, l’alternative à Google Maps, ne semble pas présenter de problèmes, et le catalogue musical est bien étoffé. Mais en général, je ne suis jamais sûre de trouver une application ou de savoir laquelle fonctionne parmi celles qui existent.
On trouve des jeux en abondance et ils fonctionnent à merveille. Même les jeux énergivores, comme Kung Fu Saga (équivalent de Genshin Impact), et divers jeux de course chargent rapidement et se jouent de manière fluide. Les huit gigaoctets de RAM suffisent, sinon le Huawei P60 Pro ferme automatiquement des applications en arrière-plan.

Source : Michelle Brändle
Acte 5, le dénouement catastrophique : le naufrage de Huawei en Europe
Le test du Huawei P60 Pro me laisse songeuse : je ne sais jamais vraiment quelles applications vont fonctionner correctement. Si vous êtes technophile, que vous aimez bricoler ou que vous trouvez toutes vos applications, ce smartphone est envisageable. Après tout, le matériel est à la hauteur : l’écran, le processeur et la batterie sont au top. L’appareil prend de très belles photos si vous aimez le détail. L’excellent zoom optique 3,5× et le diaphragme physique sont des gadgets rares dans un smartphone.
Mais les services Google et la 5G me manquent, tout comme certaines applications que j’utilise régulièrement et qui sont introuvables. Le matériel de Huawei est performant, mais son logiciel est limité ou ne fonctionne pas parfaitement. Son prix de quasiment 1200 francs suisses ou euros est trop élevé au vu de ce constat. Le smartphone ne conviendra pas à une utilisation quotidienne, surtout en Suisse avec les CFF et le mobile banking.
Des alternatives bien supérieures existent actuellement dans cette fourchette de prix, avec un bon appareil photo ainsi qu’un matériel et un logiciel fiables. Je vous recommanderais ici tout particulièrement l’Oppo Find X5 Pro, certes un peu plus vieux mais nettement moins cher. Je trouve les résultats photographiques plutôt bons avec son partenaire logiciel Hasselblad. Vous trouverez les chouchous actuels de la rédaction dans notre récapitulatif.

OPPO Find X5 Pro
256 Go, Ceramic White, 6.70", Double SIM hybride + eSIM, 50 Mpx, 5G


Dans mon monde, Super Mario chasse les Stormtroopers avec une licorne et Harley Quinn prépare des cocktails pour Eddie et Peter au bar de la plage. Là où je peux exprimer ma créativité, j'ai des fourmis dans les doigts. Mais c'est peut-être aussi parce que rien d'autre ne coule dans mes veines que du chocolat, des paillettes et du café.