Arrêtez de lire l’actualité !
Nous consommons l’actualité sans nous poser de questions sur l’impact qu’elle peut avoir sur notre santé mentale. Vous ne raterez pas grand-chose en arrêtant de la suivre. C’est toujours la même chose, de toute façon.
Une guerre interminable par-ci, une autre par-là, des morts à foison, des feux de forêt, des inondations, des rivières asséchées et empoisonnées, des attentats terroristes et des violences sexuelles, c’est une journée normale dans un fil d’actualité.
Il faut admettre que ces horreurs font office de divertissement dans nos vies répétitives. Nous aimons les évènements qui sortent de l’ordinaire, surtout s’il y a des vidéos à l’appui. Parfois, il n’y a qu’une vidéo floue prise avec un téléphone portable et les corps sont rendus méconnaissables. On est alors toujours un peu déçu. Beaucoup d’entre nous cherchent à être au courant de ce qui se passe dans le monde.
Les films d’horreur ont une fin
La question est de connaître l’impact sur notre santé mentale. Même les fanatiques ne regardent pas deux films d’horreur par jour. Or, la durée de deux films est le temps moyen que nous passons sur notre fil d’actualité tous les jours, sans compter les images qui restent dans notre tête encore plus longtemps.
Un film d’horreur se termine au bout de deux heures, alors que la terreur dans les journaux ne connaît pas de fin. Elle se renouvelle avec des titres différents tous les jours. De plus, les histoires cinématographiques ont une énorme variété, alors que celles des actualités sont toujours fondamentalement les mêmes : des hommes irresponsables sèment la désolation, la mort ou du moins la pauvreté sur des dizaines de milliers de personnes et dans la nature, parce qu’il n’y a rien de plus beau pour eux que l’argent et le pouvoir.
Je ne peux pas vivre comme ça
Tous les jours, c’est la même chose. L’indignation et l’horreur nous accablent, mais nous continuons à lire. Récemment, chez mes parents, je n’ai pas pu lire plus de deux pages de la NZZ à cause des horreurs que j’y ai trouvées. Le lendemain, je lisais l’actualité ailleurs.
Le contenu est de pire en pire. La guerre en Ukraine menée uniquement à cause d’un fou et le conflit sanglant au Proche-Orient ; les conséquences flagrantes du changement climatique ; les crétins qui continuent à le nier ; les puissances nucléaires prêtes à tirer leurs missiles à tout moment ; les initiatives sociales et écologiques urgentes systématiquement coulées parce qu’elles sont soi-disant « extrêmes » ; l’antisémitisme, la haine des personnes transgenres et les théories du complot... Trop, c’est trop. C’est une charge mentale dont nous pourrions bien nous passer. Surtout pour les personnes qui n’ont pas désactivé leurs notifications. En tout cas, pour moi, c’est trop. Un état d’alerte permanent m’engloutit avec comme seule échappatoire la perspective d’une fin du monde approchant à grands pas. Je ne peux pas vivre comme ça.
J’ai récemment décidé de ne plus lire de journaux. Premièrement, j’en souffrais, et deuxièmement, ce n’est pas sain de toujours savoir ce qui se passe dans le monde. Voici des exemples de besoins sains. Se contenter de son quotidien, être en bonne santé, être là pour ses enfants, pour ses proches, dormir suffisamment et avoir assez de temps pour soi. Chercher à savoir où a eu lieu le dernier attentat en date n’est probablement pas un bon exemple.
Une pincée d’ignorance
Il suffit de ne plus les lire pour se tenir à l’écart des horreurs. Se protéger soi-même est le plus important. Il est étonnamment facile de sortir de la bulle de l’horreur. Je n’ai pas l’impression de rater quoi que ce soit. Peut-être justement parce que je ne manque rien. Ma psyché a l’impression d’être en vacances depuis mon retrait des réseaux sociaux.
Je lis encore les nouvelles de temps en temps. Surtout pour me rappeler pourquoi j’ai pris cette décision. Parfois, j’achète un exemplaire du Spiegel. Le magazine d’actualité allemand contient plutôt des articles de fond et d’excellents reportages et sa rubrique scientifique est bien présentée. Mais même ça, je ne le supporte pas plus d’une semaine. Je dois doser.
Vous pensez sûrement que je suis ignorant. Je vois ça comme un égoïsme sain, une prise de recul nécessaire et une ignorance bonne pour la santé mentale.
Quand lisez-vous l’actualité, et comment vous sentez-vous après ? Pourriez-vous vous en passer un mois ou plus ? Dites-moi tout dans les commentaires !
Né à Zurich en 1974, Thomas Meyer est écrivain. Il a travaillé comme rédacteur publicitaire jusqu'en 2012, date à laquelle son premier roman, « Le formidable envol de Motti Wolkenbruch », a été publié. Papa d'un garçon, il a toujours une bonne excuse pour acheter des Lego. Pour en savoir plus sur lui : www.thomasmeyer.ch.