Critique de film : «Free Guy» est hilarant, mais pas révolutionnaire
Un mélange de « Truman Show » et « Ready Player One »? Non, « Free Guy » n’est pas si malin, mais tout aussi drôle, et ça me convient parfaitement.
Cette critique ne contient aucun spoiler. Vous ne lisez que les informations connues grâce aux bandes-annonces déjà diffusées.
Je n’attendais pas une révélation cinématographique avec « Free Guy », ni même une comédie inoubliable. Je m’attendais plutôt à un film du style « Very Bad Trip » ou « Y’a-t-il un flic... ». Néanmoins, ne nous enflammons pas. Le film était drôle, même hilarant.
Mais rien de plus.
Matrix revisité
Le réveil sonne. Chaque matin la même rengaine. Malgré tout, Guy (Ryan Reynolds) commence toujours la journée avec une immense joie de vivre enfantine. Saluer le poisson rouge ; enfiler la chemise bleue ; se rendre vers le café et commander un café avec une crème et deux sucres ;
travailler à la banque ; papoter avec son ami et agent de sécurité Buddy (Lil Rel Howery) puis se faire braquer. Un air de « Un jour sans fin ». Le train-train quotidien. Dans Free City, Guy et Budy n’existent pas. C’est la ville des « gens à Ray-Ban » qui font des trucs cools. Le gars se trouve juste là pour observer le spectacle, retourner à sa routine et en être très heureux, encore et encore. Guy est véritablement un personnage non joueur (PNJ) et Free City un jeu vidéo.
Seulement, Guy n’est pas au courant.
Molotov Girl (Jodie Comer) n'est de son côté pas un PNJ. Elle fait partie de ces personnes à Ray-Ban, une joueuse du monde réel. La meilleure. Elle recherche aussi le code que le patron du développement de jeux, Antwan (Taika Waititi), lui aurait volé pour créer le jeu Free City. Si elle le trouve, elle peut faire tomber Antwan. Dommage que sa rencontre fortuite avec Guy déclenche une réaction en chaîne qui fera dérailler tout et tout le monde à Free City.
« Free Guy » est-il vraiment réfléchi ?
L’idée de base n’est pas si mauvaise : et si la satire intelligente de 1998 de Peter Weir, « The Truman Show », rencontrait l’adaptation de l’adaptation cinématographique de Steven Spielberg, « Ready Player One », sortie en 2018 ?
Ce « mélange » a bien eu lieu et il se nomme « Free City ». Une utopie dans laquelle des millions de joueurs se réunissent pour accomplir des missions, faire évoluer leurs personnages et collecter des objets ou des voitures rares, peu importe comment : à Free City, tout est permis, même une brutalité et une violence extrêmes. Elles sont même encouragées. Superbe. Un clone de « Ready Player One » pour l’instant.
De l’autre côté, on a Guy, interprété par Ryan Reynolds. Un PNJ qui n’a aucune idée du monde artificiel dans lequel il passe sa vie en apparence réelle : son code décide pour lui ce qu’il doit faire, comment, quand et où. Oui, même ce qu’il doit ressentir, jusqu’à ce qu’il se révolte. Jusqu’au moment où il rencontre cette fille, Molotov, qui chante sur la musique de Mariah Carey. À partir de ce moment-là, il commence à briser ses habitudes, son programme. Guy devient petit à petit un personnage qui prend son destin en main.
La conséquence est proche de ce qu’amène la scène où le projecteur tombe du « ciel » dans « The Truman Show » : le chaos.
Tout ça me semble très prometteur. Non ? D’une manière ou d’une autre. Malheureusement, le réalisateur de « La Nuit au musée », Shawn Levy, et le scénariste de « Ready Player One », Zak Penn, n’exploitent pas pleinement le potentiel du film. La plupart du temps, « Free Guy » joue simplement avec un concept à la « Breaking Bad » : Guy, le PNJ, cesse soudainement de se comporter comme un PNJ (à la manière d’un Walter White qui sort du système) et bouleverse ainsi la routine de tous les autres PNJ.
C’est drôle au début. Parce que Ryan Reynolds s’avère être un acteur doué d’humour et charismatique qui navigue dans son élément : un mélange de « Deadpool » et de « Pokémon : Détective Pikachu » interdit aux moins de 12 ans. Guy a la naïveté d’un bambin, ce qui est logique d’un point de vue technique : il a en effet le même âge que le jeu, soit environ quatre ans.
Néanmoins, le réalisateur Shawn Levy et le scénariste Zak Penn n’osent pas exploiter totalement le potentiel de « Free Guy ». Ce n’est pas si grave si l’on se contente d’un pur divertissement, sans plus :
« Free Guy » s’avère toujours amusant.
Spectacle à gogo et abus d’effets spéciaux
L’univers du jeu à lui seul est une pure folie : vous y trouverez des Easter Eggs à foison, pleins de détails amusants et des références qui parleront aux gamers. Par exemple, lorsque quelqu’un part en arrière-plan, un joueur continue de courir contre le mur sans vraiment le heurter, ou quand des personnages sautent dans tous les sens.
À un moment, une voiture circule même avec un autre véhicule à l’envers sur son toit. Ça n’a pas d’importance, mais les amateurs de jeux vidéo apprécieront. Je suis le premier à essayer ce que physique du jeu a à offrir, juste par plaisir, quand je m’ennuie.
J’aime ce genre de détails. Ils montrent que les fabricants sont eux-mêmes aussi des gamers, ce qui contribue à donner une crédibilité à Free City.
Aucun doute, les effets spéciaux sont au rendez-vous. Tout s’effondre constamment à Free City : les joueurs détruisent des façades entières de bâtiments à l’aide de tanks, abattent des hélicoptères ennemis avec des bazookas, se lancent dans de poursuites effrénées en voiture et en moto tout en lançant des cocktails Molotov et des grenades. Entre les deux, les PNJ mènent leur vie normale et monotone qu’ils aiment tant, même s’ils sont constamment victimes de dommages collatéraux.
Nous y revoilà, pour en revenir au fait : on trouve beaucoup de comique de situation dans « Free Guy ». Un ami de Guy se fait par exemple agresser et éjecter de la fenêtre, avant d’être aidé à se relever par Guy, qui enlève les bris de verre de sa chemise et lui demande « Lundi, n’est-ce pas ? » avec un grand sourire.
Mais à nouveau, le film l’exploite mal, comme s’il n’avait pas la confiance nécessaire pour aborder des thèmes sérieux. Il n’y a pas de changement, pas de développement des personnages, rien n’est approfondi. Un monde tout ce qu’il y a de plus simple. C’est amusant un certain temps, mais empêche un approfondissement de l’univers du film, que ce soit pour moi ou pour Guy. En outre, la seule mini-phrase qui se rapproche le plus d’une vérité nouvelle et un minimum profonde est déjà spoliée dans la bande-annonce, vous n’obtiendrez rien de plus.
Tous ces points négatifs ne font néanmoins pas de « Free Guy » un mauvais film, mais juste un long métrage superficiel. Même « Bruce tout-puissant , avec Jim Carrey, montre plus de profondeur. Et pourtant, le film repose sur une prémisse très simple « Et si j’étais Dieu ? ». Ce film ne développe pas non plus ses personnages. À la fin, Jim Carrey découvre que le monde ne tourne pas autour de Dieu, c’est-à-dire lui. Et ils appellent ça du développement de caractère.
Ça me manque cruellement dans « Free Guy ». Le personnage principal est et reste un PNJ tout au long du film. Même si le film lui donne l’occasion de dépasser son programme informatique, il ne le fait que par souci de survie, l’alternative étant son extinction. Aucun choix important à l’horizon et malheureusement pas de réel développement.
Revenons-en à « The Truman Show ». Le personnage principal renonce par choix à la sécurité et au confort de sa vie en apparence parfaite pour découvrir le monde vaste, dangereux et inconnu, mais réel, qui l’entoure, quitte à perdre sa vie à la suite d’une inondation dans un immense studio rempli d’eau. C’est dramatique, voilà un choix cornélien,
une évolution du personnage.
Bilan : superficiel, mais drôle et sympathique
Oui, « Free Guy » fait partie de ces films où l’on peut dire que si connaît la bande-annonce, on connaît toute l’histoire. Et le peu qui n’est pas divulgué dans la bande-annonce, vous pouvez le découvrir par vous-même avant même d’avoir vu une seconde du film, tant ce dernier est se révèle prévisible.
Il n’en reste pas moins que ce long métrage a du charme, est drôle, très drôle même, et qu’il regorge de clins d'œil attachants surtout destinés aux gamers. Selon vos attentes, le manque de profondeur peut poser problème. Pour moi, c’est un peu une occasion manquée.
« Free Guy » reste au final tout de même un bon film avec de bonnes idées, même si la confrontation entre le monde réel et factice est traitée de manière un peu paresseuse et peu subtile, j’ai quand même beaucoup ri durant le film.
« Free Guy » peut être vu dans les cinémas à partir du 11 août. Durée du film : 115 minutes.
Vivre des aventures et faire du sport dans la nature et me pousser jusqu’à ce que les battements du cœur deviennent mon rythme – voilà ma zone de confort. Je profite aussi des moments de calme avec un bon livre sur des intrigues dangereuses et des assassins de roi. Parfois, je m’exalte de musiques de film durant plusieurs minutes. Cela est certainement dû à ma passion pour le cinéma. Ce que j’ai toujours voulu dire: «Je s’appelle Groot.»